La religion des faits, bon Dieu !

L’une des plus belles pièces écrite, à la fin du XIX° siècle, par le dramaturge norvégien, Henrik Ibsen, Un ennemi du peuple, raconte comment Dr Stockman, médecin des thermes, révèle dans un rapport, analyses de laboratoire à l’appui, que les eaux d’un établissement de cure sont contaminées et nécessitent une fermeture des lieux, pour préserver la santé des riverains.

Le journalisme et le règne de l’insignifiance

Le dernier roman de l’écrivain octogénaire, Milan Kundera, La fête de l’insignifiance (Ed. Gallimard, 2014), est un événement littéraire parce qu’il dépeint avec légèreté et sarcasme la subjectivité d’une époque. L’air du temps qu’il met à nu avec maestria se base sur la fatuité, le banal et l’anodin comme passe-temps favoris, face à l’effondrement des utopies.

Télévision hors-service public

L’autre jour, au gré d’une rencontre organisée par un groupement d’associations militant contre le racisme au Maroc, sous le slogan pertinent de « Je ne m’appelle pas Azzi », le cinéaste Noureddine Lakhmari a dit, à juste titre, que « le premier canal qui conforte le racisme au sein de la société marocaine est la télévision ».

Les chiffres et les lettres

Rta7, sebbe9, fi9… Voici quelques années déjà que la mixité des chiffres et des lettres s’est institutionnalisée dans les messages publicitaires. Certains y voient une évolution pratique de la langue, d’autres une innovation sympathique, ou un raccourci qui évite la retranscription phonétique classique. Eh bien moi j’y vois au contraire un appauvrissement de la très belle langue arabe. Vous pouvez me taxer de rétrograde ou de conservateur, j’en prends l’entière responsabilité, mais il y a des fois où j’aime que les choses restent à leur place.

Le savant et l’entrepreneur

La rencontre orchestrée par la chaîne marocaine 2M, et annoncée comme exceptionnelle, entre le penseur Abdellah Laroui et le publicitaire Noureddine Ayouch, à la faveur de la polémique lancée par ce dernier sur l’institutionnalisation de la darija, est révélatrice d’une séquence civilisationnelle : le savant et l’entrepreneur[1] en face-à-face.

La société de la surinformation

Entre Snowden et la CIA, le sniper de Targuist et la gendarmerie royale, le militant révélateur de Danielgate et la garde rapprochée du roi, l’humoriste Bassem Youssef et le général Abdelfattah Sissi en Egypte, un ordre ancien vacille. Qui surveille qui, aujourd’hui ? Qui a le pouvoir de déstabiliser qui, le citoyen fortement connecté ou les institutions partiellement déconnectées ? Qu’est-ce qui pèse plus lourd dans la balance, la puissance spectaculaire des autorités en place ou la puissance virale d’individus hyperinformés ?

E-baiser révélateur

Repassons ensemble le film de cette affaire du e-baiser qui a valu au Maroc les honneurs du Petit journal de Canal+. Deux jeunes collégiens de Nador s’embrassent, Facebook les expose, une sombre association porte plainte, la police les arrête, le procureur les poursuit pour atteinte aux bonnes mœurs, les réactions s’enchaînent en ligne, les amoureux des baisers menacent d’inonder les places publiques, puis les deux jeunes adolescents sont relaxés sans que la poursuite soit abandonnée. De cet épisode, trois leçons me semblent nécessaires à retenir.

L’appel à la lecture : l’autre révolution

Le philosophe allemand, Hegel, adorait lire le journal au petit déjeuner. Il disait que c’était « la prière du matin de l’homme moderne ». L’écrivain français, Marcel Proust, fait l’éloge de la lecture de livres qui nous permettent de « recevoir communication d’une autre pensée, tout en restant seul ». René Descartes assimile, pour sa part, la lecture des « bons livres » à « une conversation avec les plus honnêtes gens des siècles passés qui en ont été les auteurs ».

L'art de se déconnecter

Si vous voulez sentir au plus près les prochaines secousses qui se préparent en sous terrain, allez au théâtre. C’est un peu ce que suggère le philosophe Alain Badiou dans son dernier livre-entretien avec Nicolas Truong, Eloge du théâtre. Il nous dit que c’est le seul lieu qui nous permet encore de regarder en face nos vérités sans devoir les subir voire en y trouvant du plaisir. L’une des vérités qui se trament de plus en plus ouvertement est le sentiment d’être quadrillés par un monde virtuel qui opère sur nous un pouvoir de séduction irrésistible.

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