La nouvelle société du coût marginal zéro
Auteur : Jeremy Rifkin
Le prosommateur : le consommateur-producteur est en marche
La nouvelle société du coût marginal zéro, le nouvel essai de l’Economiste Jeremy Rifkin ne manque pas de sous-titres : l’internet des objets, l’émergence des communaux collaboratifs, l’éclipse du Capitalisme... Avant même d’ouvrir le livre, d’entamer la lecture, la couverture nous donne le ton, les orientations de ce nouvel opus économique qui sonne le glas, une fois encore, du capitalisme.
Après, La troisième révolution industrielle, cet auteur revient pour appuyer ses lignes, étayer sa thèse par des exemples très concrets. Un livre catégorique mais nuancé où se côtoient sans difficulté théorie et pratique. Le présent et le passé se rencontrent aussi dans cet ouvrage. Des pratiques anciennes oubliées depuis longtemps, reviennent au goût du jour et Rifkin nous raconte leur histoire.
A ce propos, il dédie tout un chapitre aux communaux collaboratifs et nous emmène à la découverte de ce vieux mode de fonctionnement qui prend aujourd’hui de plus en plus d’ampleur. « Un nouveau système économique entre sur la scène mondiale : les communaux collaboratifs. C’est le premier paradigme économique à prendre racine depuis l’avènement du capitalisme et du socialisme au début du XIXème siècle. Les communaux collaboratifs transforment notre façon d’organiser la vie économique : ils permettent de réduire considérablement l’écart des revenus, de démocratiser l’économie mondiale et de créer une société écologique durable ».
Car qu’on le veuille ou pas, le tandem charbon-pétrole est en décroissance et va vers une disparition totale. La mutation est déjà en marche même si certains refusent de la voir. Rifkin nous propose de retourner vers ce mode de fonctionnement ancien qui a été décriée par Les lumières et quelques économistes, « éclairés ». Il nous propose ainsi de revenir aux communaux d’avant le capitalisme. Lorsque le monde fonctionnait selon un autre principe de gouvernance. « Il existe en dehors de la propriété purement privée et de la « propriété publique » contrôlée par l’Etat, une forme distincte de « propriété publique par essence » qui n’est pleinement contrôlée ni par l’Etat, ni par des agents privés. C’est une propriété « possédée » collectivement et gérée par la société en général, avec des droits d’une autre nature, et en fait plus forts, que ceux d’un quelconque administrateur de l’Etat »
En clair, entre le diktat de la propriété privée (le fait de placer les richesses entre les mains d’une personne ou d’un groupe de personnes), et celui d’un Etat qui contrôle tout, une brèche s’est ouverte à nouveau : celle d’une communauté de partage et le capitalisme va devoir s’en accommoder.
Mais ce n’est pas le seul changement qui s’opère dans la société, nous dit l’économiste.
Aujourd’hui, nous précise-t-il sans ambages, les écologistes et les hackers font cause commune.
Les biologistes sont, en effet, en train de collecter les données les plus gigantesques de l’histoire en matière de génome, s’appuyant sur l’informatique. Combiner biologie et informatique n’a rien de nouveau mais ce qui est révolutionnaire en revanche, c’est le fait de créer des environnements biologiques virtuels et des écosystèmes qui permettent de générer des molécules synthétiques en quelques clics. Des interactions entre les différentes particules s’opèrent en un temps record ! «L’usage du nouveau langage informatique pour restructurer la société a réuni des intérêts variés, notamment les hackers de l’information, les hackers de la biologie, les hackers de la 3D et les hackers du web propre » !
D’ici dix ans, les imprimantes 3D vont se démocratiser. Nous allons construire nos propres voitures, nos propres objets du quotidien… Ces affirmations font toujours sourire. Mais cette « science-fiction » est en phase de devenir une proche réalité. La machine est déjà en marche et nous allons devenir tous….producteurs ! : De la production de masse à la production des masses, se réjouit l’auteur.
Notre société moderne et le capitalisme nous ont inculqué des valeurs d’exclusion.
Une des ses plus emblématiques expressions peut être incarnée par l’invention de l’automobile. Cette machine est devenue synonyme de liberté, le symbole de la réussite. Mais depuis quelques années, la donne est en train de changer. « En 2012, 800 000 personnes aux Etats-Unis avaient souscrit à un service d’auto-partage. Au niveau mondial 1,7 million de personnes partagent des voitures dans 27 pays », « en 2009, chaque véhicule partagé remplaçait 15 voitures de particuliers », «Les revenus de partage de voitures devraient croître encore plus vite en Amérique du Nord, où ils dépasseront les 3 milliards de dollars en 2016 », nous précise encore l’économiste.
Toutes ces statistiques et ces études convergent vers la même conclusion : l’économie de partage est déjà là et nous sommes en train de vivre les débuts du système économique hybride.
Aujourd’hui la société s’organise, crée une dynamique économique interne, change progressivement les choses et déplace les curseurs. 40 % de l’humanité est connectée à internet. Elle sera portée quasiment à 100 % dans les deux décennies qui arrivent. L’internet des objets sera accessible à tous. « Chacun d’entre nous pourra potentiellement devenir producteur d’information, de culture, d’objets… Chacun pourra devenir prosommateur, à la fois consommateur et producteur ».
Tout au long de ce livre, Rifkin semble nous dire une seule chose : l’économie n’est pas une simple théorie mais une pratique de tous les jours. Nous sommes tous acteurs et penseurs de ces changements et il est temps que chacun prenne l’économie en charge. Cette économie que nous produisons tous les jours !
Par : Amira-Géhanne Khalfallah
Jeremy Rifkin
La nouvelle société du coût marginal zéro
Les liens qui libèrent
509 pages
325 DH