10 scénarios catastrophes pour sauver la planète
Auteur : Alain Grousset
Alain Grousset nous livre des fictions documentaires pour nous alerter des dangers imminents qui guettent la planète. Un florilège de textes, doux-amers, regroupant 10 auteurs qui nous racontent dix histoires effrayantes dans une très belle écriture.
Glaciation, inondations, pollution, guerre atomique, disparition de la faune et de la flore, manipulations génétiques, guerre avec les machines, guerre avec les insectes…sont autant de thématiques abordées dans ce recueil de nouvelles, sous le titre : 10 façons d’assassiner la planète, comme 10 recettes faciles à exécuter pour en finir au plus vite avec la terre. Des focus si proches de la réalité et de la caricature qu’on se demande comment est-ce possible ? Alain Grousset, responsable des littératures de l’imaginaire dans le magazine Lire, a joué le rôle d’anthologiste et nous propose une fiction basée sur des prévisions bien réelles. « En explorant dix possibles souvent très noirs, les dix grands auteurs de cette anthologie ont tous la volonté d’attirer l’attention sur ce qui risque à coup sûr d’arriver si l’on ne réagit pas dès aujourd’hui », avertit l’anthologiste.
Comme nous le savons tous, la science fiction s’accommode si bien des scénarios apocalyptiques et catastrophiques. Mais l’anticipation nous donne à voir davantage la réalité et le présent, qui du coup, paraissent si grossiers.
Lee Hoffman le célèbre auteur de science fiction nous prête quelques réflexions à propos de la surpopulation de la terre. Tandis que Christophe Lambert choisit l’humour pour nous parler de la disparition de la faune et la flore. Une lecture à faire de préférence en dégustant une salade bien croquante, avertit Grousset ! Le héros de cette nouvelle est visité par un homme qui vient du XXIIème siècle «d’où je viens, explique le visiteur, la nature n’est plus qu’un souvenir lointain...(…) on a bien essayé de faire pousser des arbres, des légumes et des fleurs dans des serres, à l’abri des poisons sécrétés par l’industrie et la circulation, mais un virus a terminé ce que l’homme avait commencé. La dernière plante, une marguerite pourtant très résistante, est morte le 18 janvier 2167. Ce fut un jour de deuil mondial ».
« Un seul être vous manque et tout est dépeuplé ! », disait le petit prince de Saint-Exupéry. La disparition de la dernière fleur de la planète en est la démonstration.
Disparition de fleurs, d’animaux… mais aussi inondations. Le jour où la planète se mettrait à pleurer, nous dit poétiquement Grousset, ce jour-là, même Noé ne pourra y échapper !
Aquella de Donald A. Wolheim, nous raconte ce désastre. Cette nouvelle a la particularité d’avoir été écrite par le célèbre auteur de science fiction en 1942. Une histoire qui fait sourire malgré tout, lorsqu’on apprend que la planète Aquella s’appelait : La terre, il y a bien longtemps !
Chez Robert Bloch, Le jour se lève. Dans cette nouvelle proche de la fin du monde où la bombe atomique a tout détruit, l’auteur reste contemplatif et s’interdit tout propos moralisateur. Le narrateur raconte seulement ce qu’il voit dans des descriptions détachées et sans état d’âme, comme pour dire que même chez ce survivant, la mort s’est bien introduite, excluant toute émotion «dans un sous-sol, un studio d’artiste ouvert en plein ciel ; ses murs étaient encore intacts et couverts de toiles abstraites. Au centre de la pièce se dressait un chevalet, mais l’artiste avait disparu. Ce qui restait de lui était étalé en une masse dégoulinante sur le tableau, comme si l’artiste avait réussi à mettre quelque chose de lui-même dans la peinture ». Si la science-fiction aime les catastrophes, notre réalité semble bien s’en accommoder. Les OGM sont déjà dans nos assiettes et on n’a pas fini de découvrir leurs effets néfastes sur nos corps et leur impact sur la faune et la flore. Allons vers le futur alors pour voir un peu ce qui s’y passe. On lit cette nouvelle, comme on regarderait à travers une serrure, l’air effrayé. Pourtant, ces fictions sont aussi, autant de scénarios que l’on pourrait encore éviter. La science-fiction engagée est aujourd’hui un outil dont on peut se servir pour réaliser nos contradictions.
La guerre avec les insectes est la plus récente nouvelle, très douloureuse car tellement imminente. On se sent si proche du gouffre en lisant la projection, Le sacrifié de Philip K. Dick. Grousset s’amuse à nous introduire chaque thématique par des commentaires dont la gravité n’empêche pas l’humour et la légèreté. « Les insectes s’adaptent à l’environnement humain, ironise-t-il, Les cafards adorent nos cuisines ! Dès qu’un nouvel insecticide est trouvé, les insectes mutent aussitôt et deviennent encore plus résistants. Ils sont patients, ils savent que nous ne sommes qu’une parenthèse dans leur longue histoire. Chaque jour, ils gagnent un peu de terrain : une nouvelle maison infectée de termites par-ci, l’agrandissement d’une fourmilière par-là, les insectes nous tolèrent pour l’instant ! »
A la fin de cette lecture, on finit par se demander si avant tout, l’homme ne serait-il pas en guerre contre lui-même ? Pour les amoureux de la science-fiction ce livre est un petit bijou, pour les écolos, il est un outil de travail, pour ceux qui ne seraient pas encore conscients du danger, c’est une source d’information très riche. Il y a à boire et à manger dans ces dix façons d’assassiner notre planète. N’hésitez pas, tant que c’est encore possible !
Par : Amira Géhanne Khalfallah
10 façons d’assassiner la planète
Alain Grousset
Flammarion
142 pages
94 DH